Nuit du jeudi 23 au vendredi 24 décembre. Tandis que le colonel-major Mathias Doué, un ancien conseiller militaire de l’ambassade de Côte d’Ivoire en Chine, est chargé de maintenir un contact permanent avec les soldats révoltés, Kablan présente son rapport au chef de l’État. Son diagnostic est sans appel : le navire prend l’eau de toutes parts, il est d’autant plus urgent d’agir que les insurgés viennent de s’emparer de la « petite poudrière », à Treichville. Certains de ses collaborateurs suggèrent à Bédié de recevoir séance tenante les « meneurs », mais aussi de sacrifier une partie de la hiérarchie militaire. Le président leur répond, de manière évasive, qu’il envisage de faire « une annonce », alors que la radio et la télévision d’État sont déjà aux mains des rebelles. Il accepte finalement de leur accorder une audience, mais seulement le lendemain matin. Dans la foulée, il décide de nommer le colonel-major Doué à la tête des forces terrestres, mais il n’aura pas le temps d’officialiser sa décision. À l’extérieur, en effet, les événements se précipitent...
Vers 2 heures du matin, les mutins prennent le contrôle de l’aéroport international Félix-Houphouët-Boigny, d’où ils chassent le personnel technique chargé d’assurer la sécurité des liaisons aériennes. Un peu plus tard, ils bloquent l’accès des ponts De-Gaulle et Houphouët-Boigny, qui relient le sud et le nord d’Abidjan, tout en continuant à s’en donner à cœur joie, en ville. Retranché dans la résidence d’Houphouët avec des membres de sa famille et plusieurs collaborateurs civils et militaires, Bédié se montre de plus en plus irrité. Il reçoit, au cours de la nuit, plusieurs appels téléphoniques. L’un d’eux émane de Mathieu Kérékou. « Crois-en mon expérience d’officier, lui explique le président béninois. À en juger par les images des télévisions étrangères qui me parviennent à Cotonou, il ne s’agit pas d’une simple mutinerie. Ces gens savent qu’ils risquent le peloton d’exécution. S’ils vont aussi loin, c’est qu’ils sont prêts à tout. »
Mathias Doue
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